Une loi inutile et dangereuse
1. Une proposition de loi, "le pacte civil de solidarité"
(PACS) est actuellement à létude, visant
à établir " un cadre juridique pour des
couples qui ne peuvent ou ne veulent se marier ". Les
auteurs de ce projet affirment quil n'y est pas question
dun " mariage bis " et quil ne porte
pas atteinte à linstitution matrimoniale. Il
sagirait de simples mesures pratiques sans aucune
autre prétention.
2. Mais comment comprendre de tels propos, quand ce projet
emprunte, sans les obligations correspondantes, la plupart
des droits inhérents au mariage, rendant celui-ci,
finalement, inutile ? Le mariage fixe le cadre juridique
qui favorise la stabilité de la famille. Il permet
le renouvellement des générations. Il n'est
pas un simple contrat ou une affaire privée, mais
constitue l'une des structures fondamentales de la société,
dont il maintient la cohérence. Le mariage doit être
valorisé comme l'alliance privilégiée
entre un homme et une femme.
3. Qu'on le veuille ou non, ce projet détermine
en partie l'avenir de notre société. Il est
regrettable et inquiétant qu'il n'ait pas été
précédé d'une réflexion suffisamment
approfondie auprès d'experts et d'une consultation
sérieuse de toutes les familles de pensée.
Réflexions et consultations auraient permis, sans
que l'on ait à légiférer, d'envisager
des mesures pratiques, tout en fixant des limites à
des revendications impossibles à satisfaire.
4. L'Église catholique ne peut pas rester indifférente
à ce qui faciliterait de manière juste l'existence
de personnes engagées dans des situations singulières
et parfois difficiles. Ces personnes doivent être
accueillies et écoutées. Mais des tendances
ou des modes de vie dans lesquels certains se reconnaissent
individuellement n'ont pas à devenir, à travers
la loi, des références sociales.
5. Une société doit certes avoir le souci
qu'aucun des siens ne soit marginalisé ou ne se retrouve
dans des conditions invivables. On peut rechercher pour
cela des mesures appropriées et limitées à
leur objet. Or la proposition de loi en question engage
une philosophie, même implicite, de la vie entre les
hommes. Ne pas le reconnaître montrerait que nous
ne savons plus évaluer les conséquences possibles
sur notre avenir commun de décisions légales.
6. Nous savons combien l'instabilité affective de
nombreux couples entraîne des souffrances et fragilise
déjà trop les familles et le lien social.
Est-il pertinent de conforter par une nouvelle loi cette
précarité et l'irresponsabilité qui
peut en découler ? Est-il pertinent de faire porter
à la société une charge financière
supplémentaire, difficilement justifiable alors même
que l'on réduit par ailleurs l'aide aux familles
?
7. Il serait préjudiciable de voir une législation
entériner une hiérarchie dunions, au
gré des tendances subjectives des personnes, accentuant,
de fait, les disparités de droits et de devoirs.
La société na pas à reconnaître
toutes les associations affectives qui relèvent de
lexpérience singulière de chacun et
du domaine du privé. La loi ne peut sédifier
que sur des réalités universelles et non pas
sur des désirs, voire des représentations
affectives singulières.
8. Pour certains promoteurs de cette proposition de loi,
lobjet principal des mesures envisagées est
de fournir une reconnaissance sociale à la relation
homosexuelle. Ils revendiquent, pour un avenir plus ou moins
proche, un " mariage " pour les homosexuels, voire
ladoption denfants. Or il n'y a pas déquivalence
entre la relation de deux personnes du même sexe et
celle formée par un homme et une femme. Seule cette
dernière peut être qualifiée de couple,
car elle implique la différence sexuelle, la dimension
conjugale, la capacité dexercer la paternité
et la maternité. Lhomosexualité ne peut
pas, à l'évidence, représenter cet
ensemble symbolique.
9. Une chose est de respecter les droits dont bénéficient
toutes les personnes, une autre est de vouloir instituer
une orientation particulière, voire den faire
un modèle. A-t-on suffisamment mesuré que
la recherche à tout prix du semblable ou de lidentique
est en soi une source d'exclusions ? La société
ne peut pas se construire sur la recherche de la similitude
mais sur la différence de lhomme et de la femme
: il ny a ici aucune discrimination à légard
de quiconque, aucun rejet de qui que ce soit, mais une reconnaissance
des conditions nécessaires à la vie en société.
10. Alors que nous voyons tant de jeunes se désocialiser,
que les plaintes dabsence de repères se font
de plus en plus nombreuses, il ne faut pas que la loi ajoute
de lincohérence à la confusion relationnelle
de lépoque actuelle. Les réflexions
menées sur lintégration sociale des
jeunes ont assez fait ressortir le rôle décisif
des parents, père et mère, rôle reconnu
nécessaire pour léducation des enfants.
Il y aurait une réelle contradiction à rappeler
aux parents leur mission sociale alors qu'en même
temps on affaiblirait limage sociale du mariage et
de la famille.
11. Notre conviction est simple : le droit offre suffisamment
de possibilités pour régler des problèmes
sociaux ou économiques rencontrés par certaines
personnes "qui ne peuvent ou ne veulent se marier".
Il n'est pas nécessaire d'inscrire dans la loi un
nouveau statut relationnel qui risque de déstructurer
davantage le sens du couple et de la famille.
En le rappelant, nous voulons servir la société
tout entière.
Conseil Permanent
Le 17 septembre 1998
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