Un œcuménisme installé ?
Concurrence ou complémentarité ?
Parmi les facteurs qui contribuent au ralentissement du mouvement œcuménique, la division interne des grandes familles confessionnelles est certainement l’un des plus importants. Comment en effet faire l’unité avec un partenaire divisé ou lorsque l’on est soi-même traversé par de multiples courants qu’il faut ménager ? Les tensions récentes au sein de l’Eglise catholique à propos de l’autorisation de célébrer la messe en latin, selon le missel de 1962 promulgué par… Jean XXIII, nous l’ont rappelé. Mais aussi celles qui traversent la Communion anglicane, l’orthodoxie et le protestantisme.
Paradoxalement, le mouvement œcuménique lui-même a été marqué par des tensions internes, entre des lieux ou des personnalités fortes qui n’avaient pas les mêmes options. Ainsi sont nées des associations, des centres et des revues multiples contribuant au dynamisme de ce mouvement. Mais en période de pauvreté humaine et financière, ces complémentarités sont plus difficilement tenables et, loin d’être stimulantes comme par le passé, peuvent même apparaître comme le contre-témoignage d’une concurrence.
C’est pourquoi Unité des chrétiens et Unité chrétienne, aux titres si proches, ont décidé d’unir leurs efforts : un partenariat les conduit à un recentrement sur leurs vocations respectives. Le Service National (et non pas parisien !) continuera de publier votre revue de formation et d’information. Fortement soutenue par la Conférence des évêques catholiques dans le cadre de son engagement au sein du Conseil d’Eglises chrétiennes en France, Unité des chrétiens voit son conseil de rédaction multiconfessionnel étoffé par l’arrivée de nouveaux membres : Franck Lemaître, Michel Stavrou et Philippe Sukiasyan, tous trois issus d’Unité chrétienne. Témoin de la richesse du pôle œcuménique lyonnais et fidèle à l’héritage du Père Couturier, ce centre, de son côté, se consacrera à sa vocation d’animer l’œcuménisme spirituel, plus particulièrement la Semaine de l’Unité dont il aura désormais l’exclusivité du matériel : l’édition des affiches et livrets, mais aussi la diffusion du dossier de réflexion sur le thème de la Semaine et du schéma de célébration adapté pour notre monde francophone.
Nous espérons ainsi mieux répartir nos forces mais aussi donner un exemple d’unité en ce début d’année 2007, qui sera marquée par l’organisation de plusieurs rassemblements œcuméniques européens. D’abord le Rassemblement « Ensemble pour l’Europe », le 12 mai, à Stuttgart et dans plusieurs grandes villes de notre continent, à l’initiative de plus de cent cinquante communautés et mouvements chrétiens. Puis, bien sûr, le troisième Rassemblement œcuménique européen, organisé par la KEK et le CCEE à Sibiu, en Roumanie, du 3 au 8 septembre. Gageons qu’ils seront complémentaires, et donc témoins du dynamisme de réseaux différents qui font la richesse de l’Eglise de Jésus-Christ quand ils manifestent sa « catholicité » et ne reflètent pas une logique mondaine de concurrence.
Lyon, Sibiu, les villes dont vous parle ce numéro un peu spécial, apparaissent à plus d’un titre comme des ponts, marquées toutes deux par une grande diversité ecclésiale et leur ouverture vers d’autres pays d’Europe. Après le dossier replaçant le centre Unité chrétienne dans l’horizon lyonnais, celui que nous consacrons au Rassemblement de Sibiu propose une introduction aux nombreux documents préparatoires déjà disponibles. Sur le site internet <eea3.org>, vous trouverez par exemple un document de travail (Study Guide) et des fiches sur chacun des neuf thèmes. Dans notre revue, après avoir traité de l’unité de l’Europe (n° 133 de janvier 2004) et des migrations (n° 143 de juillet 2006), nous évoquerons les défis de la sauvegarde de la création (n° 147 de juillet 2007). Le dossier de ce numéro est plus modeste : après avoir resitué la rencontre de septembre prochain dans la dynamique des précédents rassemblements européens, il présente la petite cité de Transylvanie dans le paysage religieux roumain et décrit un exemple de collaboration entre des Eglises appelées à chasser les démons de la concurrence pour témoigner de la Lumière du Christ dans une Europe de plus en plus sécularisée.
P. Michel Mallèvre
Témoigner du dynamisme de réseaux différents qui font la richesse de l’Eglise de Jésus Christ quand ils manifestent sa « catholicité » et ne reflètent pas une logique mondaine de concurrence |