Lettre d'information

Pour une tombe chrétienne

diversité, cette fraternité qui implique une certaine forme d’égalité, s’exprime à travers le caractère répétitif des tombes. On peut sur ce point estimer que cette réduction à la « portion commune », y compris et d’abord dans l’espace - la taille d’une tombe est déjà une forme de stéréotype - est l’un des chemins par lesquels se fait le travail de deuil chez les survivants. C’est également dans cette perspective que l’on peut situer les deux marques de la tombe : elle est lieu à la fois lieu de culte et lieu de mémoire.

Un lieu de culte

Dans sa réalisation comme dans son entretien, la tombe comporte une forme de culte des morts qui intègre une dimension de dépense à caractère sacrificiel. La dépense pour une tombe, qui certes peut parfois se dévoyer en luxe ostentatoire, n’a pas à être suspectée. Il s’agit d’une oeuvre « pieuse » qui permet aux vivants de dire leur dette à l’égard de ceux qui les ont précédés.

De plus, l’art funéraire est ainsi l’une des voies par lesquelles l’humanité inscrit son désir de « dignité » pour chaque homme alors que la vie, la maladie et la mort ont apporté à chacun son lot de disgrâces. La beauté et la noblesse de la tombe permet d’honorer ces requêtes d’humanité. Sur ce point notons que les cimetières monastiques constituent une exception qui confirme la règle : le propos de renoncement caractéristique de ce type de vie, conduit à un dépouillement parallèle de la tombe, qui dans certains cas, va jusqu’à l’ensevelissement à même la terre ou même l’anonymat. Mais si la dimension de « dépense » est ici totalement absente, c’est parce que le sacrifice est antérieur à la mort elle-même.

Ce n’est pas un hasard si les anciens rituels de profession faisaient des allusions explicites aux funérailles (prostration sous le drap mortuaire, par ex.), en voulant évoquer la « mort au monde » du moine. La belle simplicité des cimetières monastiques qui, par la paix dont ils témoignent, exprime la force de la foi chrétienne devant la mort, ne peut être tenue comme un modèle général mais seulement comme un idéal type rappelant à tous, par son caractère limite, le sens même de la tombe.

Lieu de culte, la tombe le sera également à travers les symboles qu’elle intègre : si la croix figure habituellement sur la tombe des chrétiens, ce n’est pas seulement pour rappeler que la mort configure le chrétien au Christ en croix dans la promesse de participer à sa résurrection. C’est aussi parce que le symbole de la croix fait de la tombe chrétienne, une sorte de lieu liturgique où les vivants sont renvoyés non seulement à l’absence de celui qui les a quittés, mais aussi à sa présence dans le mystère de Dieu. La prière pour les morts n’est pas qu’une forme de charité à leur égard : elle est célébration de l’espérance chrétienne qui s’exprime dans les

<< 1 2 3 4 5 6 >>

Enregistrer au format PDF  Version imprimable de cet article

Sur le même thème :