Sauvés
dans l'espérance
Mgr Pierre-Marie Carré, archevêque d'Albi
"Sauvés dans l’espérance". C’est
le titre de l’encyclique que le Pape Benoît XVI nous
donne à l’entrée de la période de l’Avent.
Cette période de l’année est toute centrée
sur l’espérance qui nous vient de Dieu.
Pour nous relancer dans une véritable
attente, je vous propose quelques réflexions inspirées
de cette encyclique. Bien sûr, il faudra la lire pour en
percevoir toute la portée. Même si certains développements
sont plus ardus, surtout dans la première partie, ce texte
nous aide à fonder vraiment notre espérance en Dieu.
Le Saint-Père présente au fil de
sa lettre plusieurs témoins de l’espérance.
Placés dans des conditions humainement impossibles, ils
ont trouvé une raison de vivre dans leur relation à
Dieu, maître de l’impossible, qui leur a permis de
ne pas désespérer. C’est vrai de Joséphine
Bakhita, esclave soudanaise, plusieurs fois vendue à des
maîtres cruels et violents, c’est vrai aussi du Cardinal
Nguyên Van Thuan, pendant treize ans en prison au Vietnam,
soutenu par la prière, et de bien d’autres encore.
Mais des témoignages ne suffisent pas.
Benoît XVI, dans une discussion parfois serrée avec
de nombreux penseurs, réfléchit à ce qu’est
vraiment notre espérance. Il y a d’abord un lien
étroit entre foi et espérance. Une foi qui n’est
pas tournée vers l’avenir ne tient pas. Il existe
dans le cœur humain une attente que les réalités
matérielles ne peuvent pas rassasier, même si souvent
elles l’étouffent. Oui, affirme
le Pape, il y a au fond de nous un désir fort qui est la
véritable espérance.
L’encyclique écarte deux objections
souvent faites à l’espérance chrétienne
: mettre sa confiance dans le progrès humain ou les sciences,
n’a rien à voir avec elle. C’est
l’amour, et même un amour inconditionnel (voir Romains
8,38), qui seul peut sauver l’être humain et lui donner
d’espérer. De plus, la véritable espérance
ne peut pas être réduite au seul individu : elle
est communautaire.
En résumé, nous désirons
la « vraie vie » qui ne peut venir que d’une
communion avec Dieu (Jean 17,3), source de la Vie. En entrant
dans une relation authentique avec le Christ Jésus, nous
participons à sa manière d’être pour
les autres et découvrons la véritable espérance
chrétienne qui se tourne vers tous.
Pour achever sa lettre, le Pape invite à
nous renouveler dans une prière qui s’appuie sur
l’espérance et la nourrit. Il réfléchit
à l’obstacle que représente la souffrance.
Enfin, rappelle-t-il, s’il n’y a pas un jugement final
qui implique à la fois justice et grâce, notre espérance
reste limitée à cette terre.
Avec Marie, grande figure de l’Avent, mère
de l’espérance, préparons-nous à la
fête de Noël.
†Pierre-Marie Carré
Archevêque d'Albi
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Le
cadeau de Noël de Benoît XVI
Mgr Pascal Delannoy, évêque auxiliaire de Lille
Extrait de l’éditorial d’Eglise
de Lille
En ce temps de l’Avent, nous nous souvenons
que le Christ est venu dans notre histoire, qu’il vient
encore aujourd’hui à notre rencontre et qu’il
reviendra, un jour, définitivement dans sa gloire. C’est
là notre espérance de croyants ! C’est cette
même espérance qui est le thème de la deuxième
encyclique de Benoît XVI dont j’aimerais vous partager
deux aspects à l’approche de Noël.
Nous l’avons oublié, mais la
foi et l’espérance sont intimement liées
!
Dès le début de sa réflexion
le pape vient nous interroger : l’espérance est-elle
réellement présente en nous ? Pour répondre
à cette question le pape nous entraîne à lire
quelques passages de la bible et tout particulièrement
l’épître aux hébreux pour y découvrir
que l’espérance est concomitante à la foi,
elle « provient de la rencontre réelle de Dieu…parvenir
à la connaissance de Dieu, le vrai Dieu, cela signifie
recevoir l’espérance (§3) ».
Cette réflexion nous invite à revisiter la distinction
proposée par la « Lettre aux catholiques de France
» (1) entre la transmission et l’appropriation de
la foi. Si la foi chrétienne ne fait pas l’objet
d’une appropriation personnelle, fruit d’une rencontre
réelle avec Dieu, notre espérance demeurera imperceptible.
Pour illustrer cette réflexion, le pape prend l’exemple
d’une africaine de la fin du 19ème siècle,
Joséphine BAKHITA qui, dès son plus jeune âge,
avait été réduite en esclavage. C’est
au cœur de ses souffrances qu’elle vivra la rencontre
de Dieu qui lui donnera dans un même et unique mouvement
la foi et l’espérance. « Désormais,
écrit le pape, elle avait une espérance, non seulement
la petite espérance de trouver des maîtres moins
cruels, mais la grande espérance : je suis définitivement
aimée et quel que soit ce qui m’arrive, je suis attendue
par cet Amour (§3) ».
Tout naturellement le pape nous propose alors
une réflexion sur la vie éternelle, cette «
espérance qui transforme et soutient notre vie (§10)
».
C’est dans ce passage de l’encyclique
que retentit une question qui nous est peu familière mais
qui est pourtant essentielle pour les croyants que nous sommes
: désirons-nous vraiment la vie éternelle, «
ce moment de l’immersion dans l’océan de l’amour
infini, dans lequel le temps, l’avant et l’après,
n’existe plus (§12) » ?
Dans la nuit, ou au jour de Noël, prenons
le temps de répondre à cette question en contemplant
dans la crèche celui qui est venu pour nous donner la Vie
!
†Pascal Delannoy
Evêque de Lille
(1) Les évêques
de France, « Proposer la foi dans la société
actuelle », Cerf 1996, 1ère partie § 4
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La parabole du GPS
Mgr Hippolyte Simon, archevêque de Clermont
Vice-président de la Conférence des évêques
de France
Extrait de l’éditorial de Catholiques
en France, janvier 2008
Le pape Benoît XVI, avec son encyclique
Sauvés en espérance, nous invite à méditer
sur l’importance de l’espérance pour notre
vie de tous les jours. L’espérance chrétienne
nous ouvre un chemin vers le royaume du Christ. Ce que nous espérons,
ce n’est pas le paradis sur la terre, mais le Royaume où
nous retrouverons toute la communauté des sauvés,
la communauté des saints, telle que nous la fêtons
justement au jour de la Toussaint.
Dans ma jeunesse il y a donc déjà assez longtemps
! , nous autres chrétiens devions nous expliquer avec d’autres
militants, en particulier ceux qui étaient de référence
marxiste. Ils nous disaient à peu près ceci : vous
les chrétiens, avec votre espérance du Royaume,
vous êtes un peu déconnectés de la vraie vie.
Vous espérez pour l’au-delà. Nous, au contraire,
ce qui nous intéresse, ce sont les engagements, ici et
maintenant, pour une plus grande justice et un meilleur partage
des conditions de vie. Il n’était pas toujours facile
de répondre à cette objection. Mais récemment,
en méditant, dans ma voiture, sur mon GPS, j’ai trouvé
l’articulation qui m’a parfois manqué dans
ces échanges, par ailleurs souvent fraternels.
Avez-vous noté comment marche votre GPS ? Avez-vous noté
la première question qu’il vous pose ? Il vous demande
: où voulez-vous aller ? Autrement dit, quelle est votre
destination ultime ? Ensuite, il fait un calcul, puis il affiche
la carte du quartier où vous êtes. Il entreprend
alors de vous conduire progressivement. Mais, même s’il
se focalise sur la carte de l’endroit où vous êtes
présentement, il n’oublie jamais votre destination.
Grâce à cette parabole du GPS, il est facile de comprendre
qu’il est utile et important de méditer sur l’espérance.
Car en nous disant notre destination ultime, elle fonde les choix
de notre vie. Elle est donc à l’œuvre à
tout instant de notre existence.
À l’aube de la nouvelle année 2008, je souhaite
à tous les lecteurs de Catholiques en France un bon chemin
!
† Hippolyte Simon
Archevêque de Clermont
Vice-président de la Conférence des évêques
de France