Lettre d'information

La réconciliation comme don : péché et grâce

la crise, se demandant s’il n’y a pas, "traversant toutes les couches de la population, outre ce que l’on a souvent appelé "l’incapacité à porter le deuil", une sorte d’incapacité croissante "de se laisser consoler" et de voir dans la consolation autre chose qu’un apaisement impuissant(2)". Notre époque aurait du mal à se laisser consoler, dans le même sens qu’elle résiste à la douceur, à la miséricorde de Dieu qui laisse son coeur réagir devant la misère des siens. Cette miséricorde qui est un trait de la sensibilité humaine, mais que la Bible attribue à Dieu avec une audace anthropomorphique décidée. Le pardon est un don de Dieu de miséricorde sur le péché de l’homme qu’il aime. Il convient pour l’entendre de s’y laisser convertir.

Comme un arrière-goût de pessimisme anthropologique

Parce que notre époque a du mal à se laisser consoler, elle voit parfois l’avenir de son monde dans la noirceur et la déchéance progressive. Elle a du mal aussi à espérer pour elle et pour ses enfants. Elle perçoit et dénonce la domination de la violence qui semble accréditer une suprématie des forces mauvaises au travail.

Et pourtant, en tant que croyant, il convient de se détacher de ces perspectives pessimistes lorsqu’elles sont abusives. La possiblité du pardon ouvre d’autres possibles que la transmission et la répercussion ininterrompues de la violence entre les hommes ou sur le monde. Ils peuvent advenir par l’usage de la raison humaine, si tant est que celle-ci est l’auteur de la violence (3), ce qui lui fait front, et la maîtrise. La raison humaine est puissante et constructive, elle saurait préserver l’humanité et le cosmos. Mais elle est aussi faussée lorsqu’elle n’entend pas la possibilité de pardon, qui ne se justifie que par l’amour exercé, non par la déduction logique.

Le pardon, qui préserve le don initial de la création, est autre que le droit à la riposte dans le conflit. Il est la grâce de Dieu qui prend chair là où ce qui détruit l’homme cherchait à prendre forme. Le pardon est la grâce incarnée. Là où la logique établirait la légitimité de la riposte, de la vengeance ou de l’affrontement, le pardon suit une autre voie. Celle de la Croix du Christ qui veut que Dieu pardonne à l’homme, jusqu’au meurtre de son Fils. Puisqu’il l’a fait : envers ceux qui avaient fui la proximité de la croix, il s’est donné lui-même, encore, en donnant l’Esprit et suscitant l’Eglise. L’Eglise ne peut que pardonner et annoncer qu’elle vit du pardon car elle-même en advient.

Le logique de l’amour de Dieu est inscrite dans l’histoire de l’humanité, c’est-à-dire inscrite par la présence du Christ historique durant ses années de vie en Palestine. Mais aussi dans les formes historiques données par les hommes lorsqu’ils se tiennent dans l’attention à l’Esprit, présence de Dieu dans l’homme. La logique de l’amour de Dieu s’inscrit aussi dans le corps de l’homme, qui est son

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